L’endettement de l’Algérie : état des lieux et perspectives

En 2024, l’Algérie affiche un ratio dette/PIB inférieur à 3 %, un des niveaux les plus bas d’Afrique du Nord. L’État continue de financer ses besoins principalement par la création monétaire interne, évitant ainsi les marchés financiers internationaux. Pourtant, la croissance reste étroitement liée aux recettes des hydrocarbures, soumises à de fortes fluctuations.Le risque de déséquilibre budgétaire persiste, alimenté par la dépendance aux importations et la volatilité des prix du pétrole et du gaz. Les réformes économiques avancent lentement, alors que la pression sociale et démographique s’intensifie.

Où en est l’économie algérienne en 2024 ?

En 2024, l’économie algérienne continue de tourner quasi exclusivement autour de ses hydrocarbures. Gaz naturel et pétrole restent la charpente du PIB national. Depuis 2022, la croissance du pays dépasse celle de la plupart des voisins producteurs. Pourtant, la réalité se partage : la production de pétrole brut recule en 2023, pendant que le gaz effectue un bond de près de 6 %. Désormais, le gaz naturel représente 60 % de la production totale d’hydrocarbures et des exportations. Avec une Europe qui cherche désespérément à sécuriser son approvisionnement, les liens énergétiques se renforcent sur fond de tensions internationales.

Côté chiffres, le PIB réel du secteur des hydrocarbures progresse de 4,5 % sur 2023. Cette relance propulse les réserves de change à des niveaux inédits : elles passent de 47 à 70 milliards de dollars entre 2021 et 2023. La Banque centrale d’Algérie maintient son taux directeur à 3 %, tentant de privilégier la stabilité monétaire malgré une inflation qui dépasse 9 %.

Pourtant, beaucoup de piliers restent fragiles. L’agriculture locale ne couvre pas les besoins, forçant le pays à acheter massivement céréales et légumineuses à l’international. L’électricité, produite à plus de 95 % à partir du gaz, alimente avant tout le marché intérieur ; presque la moitié du gaz produit n’alimente que la consommation nationale. Le quotidien économique se joue sur deux tableaux : un marché officiel et un marché parallèle, ce qui nourrit mécaniquement ruptures d’approvisionnement et écarts de prix.

Le soutien budgétaire de l’État maintient l’investissement et la consommation. Mais le système fonctionne surtout à la rente, empêchant une transformation réelle de l’économie et laissant subsister des déséquilibres importants entre les différents secteurs.

L’endettement extérieur : chiffres clés, enjeux et évolutions récentes

La dette extérieure de l’Algérie demeure très contenue à l’échelle du Maghreb. Là où d’autres pays multipient les emprunts, Alger a choisi la prudence, s’interdisant de recourir massivement aux créanciers étrangers. L’encours de cette dette reste loin des seuils habituellement surveillés par les organismes internationaux tels que le FMI. Derrière cette stratégie se cachent d’abord une histoire complexe avec ces institutions dans les années 1990, mais aussi une situation de réserves de change abondantes ces dernières années.

La réserve de devises grimpe nettement : 47 milliards de dollars en 2021, près de 70 milliards en 2023. Cette réserve confère au Trésor algérien une marge de manœuvre peu commune pour la région. Même avec un déficit budgétaire autour de 7 % du PIB attendu en 2024, la dette publique totale se maintient sous les 50 % du PIB. Le Fonds de Régulation des Recettes (FRR) dépasse les 8 % du PIB et sert de matelas de sécurité en cas de retournement brutal des marchés.

On peut résumer la politique économique actuelle en quatre axes :

  • Soutien appuyé à l’investissement public et à la consommation, pour entretenir la croissance.
  • Recherche d’expertise technique internationale, sans prise de risque financière directe.
  • Pilotage rigoureux des réserves de change, gage de crédibilité auprès des partenaires.
  • Ouverture encadrée aux investissements directs étrangers, mais sans céder sur les décisions souveraines.

Les prochaines années s’annoncent déterminantes : préserver la confiance, gérer prudemment les réserves et avancer sur la voie de la diversification, sans céder sur l’indépendance financière qui fait aujourd’hui la spécificité algérienne.

Jeune professionnel algérien analysant graphiques financiers au bureau

Quels risques et quelles perspectives pour la stabilité économique du pays ?

L’Algérie avance, mais le pas reste incertain. Sa dépendance aux hydrocarbures pèse sur le destin économique collectif. Une chute brutale des cours du pétrole, du gaz, et l’ensemble du modèle vacille, comme l’ont montré les années 80 ou les soubresauts sociaux d’octobre 1988, prélude à une décennie noire. Aujourd’hui, la croissance du PIB se maintient, mais en dehors de l’énergie, le moteur s’essouffle, tandis que l’inflation dépasse toujours les 9 %.

Côté secteur privé, le dynamisme tarde à venir. Les investissements directs étrangers stagnent autour de 0,5 % du PIB, à des années-lumière des standards régionaux. Le climat des affaires subit les contrecoups d’un marché administré, doublé d’une économie parallèle, là où pénuries et pratiques informelles brouillent toute visibilité. Les banques, à dominante publique et très prudentes, peinent à soutenir la diversification promise.

La pression internationale pousse le pays à engager sa transition bas-carbone. L’Algérie vise une baisse de 7 à 22 % de ses émissions à l’horizon 2030. Mais quand l’électricité reste quasi entièrement produite au gaz et que l’agriculture dépend massivement des importations, la marche est haute. Beaucoup d’ambitions affichées, peu de réalisations pour l’instant. Le panier alimentaire continue d’être alimenté par l’extérieur.

Le filet social algérien tient aujourd’hui grâce à la redistribution des revenus tirés de l’énergie. Sortir d’un système basé sur des liens d’intérêts et stimuler un secteur privé plus innovant s’impose pour stabiliser la trajectoire. Le souvenir du Hirak et les débats autour de la Charte pour la paix rappellent combien la cohésion politique et la solidité économique restent imbriquées, et combien la stabilité demeure fragile.

2024 : l’Algérie marche sur une dalle qui vibre. L’avenir, entre rebond ou blocage, dépendra de la capacité à transformer la rente en levier de croissance réelle. Le compte à rebours s’est enclenché, il reste à savoir de quel côté basculera le pays.

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